Soixante ans du circuit Bugatti – Histoire d’une naissance
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Soixante ans du circuit Bugatti – Histoire d’une naissance

Sorti de terre en 1965 et inauguré l’année suivante, le circuit Bugatti a vu le jour à l’initiative de deux dirigeants de l’ACO à cette époque, son Président Jean-Marie Lelièvre, et Jacques Finance, Président de la commission sportive.

Si l’idée d’une piste d’essais pour les automobilistes est tout d’abord évoquée par Gustave Singher, président de l’ACO de 1910 à 1947, les prémices de la naissance du circuit Bugatti remontent au début des années cinquante, lorsque Jean-Marie Lelièvre accède à la présidence après le décès de Paul Jamin, qui avait succédé à Singher. Nous sommes en 1951 et, depuis deux ans, les 24 Heures du Mans ont retrouvé leur place sur le calendrier international du sport automobile dans le monde en reconstruction de l’après-Seconde Guerre mondiale.

Vers un circuit permanent au Mans

A cette époque, les principaux circuits de l’Hexagone empruntent surtout des portions habituellement ouvertes à la circulation. C’est le cas bien sûr au Mans, mais aussi à Reims, Rouen les Essarts ou encore Charade, près de Clermont-Ferrand. Le seul véritable circuit permanent alors en activité en France se trouve en région parisienne : Montlhéry et son anneau de vitesse ceinturant un tracé routier. Ce constat donne à Jean-Marie Lelièvre l’idée de la création d’un circuit permanent au Mans.

Le remboursement du prêt consenti par le Conseil Départemental de la Sarthe pour les énormes travaux de modernisation et de réaménagement des infrastructures du circuit des 24 Heures, consécutifs à la tragédie du 11 juin 1955, retarde toutefois la mise en œuvre de ce projet. Mais Jean-Marie Lelièvre ne désarme pas, notamment en publiant dans le magazine l’Action automobile un article sur la difficulté d’organiser des courses automobiles en France. Les ASA (Associations Sportives Automobiles) affiliées à l’ACO, qui souhaitent un circuit permanent, s’en font également l’écho.

C’est au début des années 1960 que Jean-Marie Lelièvre va concrétiser cette ambition, également sous l’impulsion de Jacques Finance, président de la Commission sportive de l’ACO depuis 1949, après avoir été pilote puis membre du collège des commissaires.

La main gauche de Charles Deutsch

L’étude du tracé est confiée à Charles Deutsch. Créateur avec René Bonnet de la marque DB, qui se distingue aux 24 Heures à la fin des années 1950 et au début des années 1960, il deviendra par la suite Directeur de course du double tour d’horloge sarthois.

Faute de véritables circuits permanents de référence en France, il s’inspire… de la paume de sa main gauche pour créer un tracé constitué d’une suite de virages en épingle, de courbes aux rayons importants et de courtes lignes droites. Il comprend aussi une portion commune aux 13 kilomètres du circuit des 24 Heures, de la ligne droite des stands au Tertre rouge, qui commande l’entrée de la ligne droite des Hunaudières, ouverte à la circulation en dehors de la période des 24 Heures.

Après une étude menée en 1963 et relayée par la presse régionale et nationale, les plans sont arrêtés, puis validés par Jean-Marie Lelièvre à la fin de cette même année. Commencés pendant l’hiver par le terrassement, les travaux sont achevés avant l’édition 1965 des 24 Heures du Mans : ce qui va devenir le circuit Bugatti est inauguré en 1966.

L’ancien pilote Charles de Cortanze est le premier Directeur à la fois du circuit et de son école de pilotage, créée courant 1965. A noter que parmi les premiers moniteurs figure son fils André, futur pilote et grand ingénieur, concepteur entre autres de la Peugeot 905 victorieuse des 24 Heures du Mans 1992 et 93.

« Le circuit Bugatti est d’une polyvalence telle qu’on peut y organiser tout ce qu’on veut », sourit Hervé Guyomard, qui en fut le Directeur de 1971 à 2006. Outre l’idée première d’une école de pilotage, le circuit Bugatti accueille rapidement des compétitions d’envergure internationale comme la Formule 2 en 1966, la Formule 1 en 1967 pour la seule et unique fois de son histoire avec le Grand Prix de l'ACF, ainsi que des visites régulières du Tour de France automobile. Il est aussi aujourd’hui un rendez-vous incontournable des compétitions sur deux roues, comme les 24 Heures Motos et le Grand Prix de France MotoGP, dont les éditions 2025 auront respectivement lieu du 17 au 20 avril et du 9 au 11 mai.

PHOTOS : le premier parc auto de l'école de pilotage en 1966 (en haut, D.R. / ARCHIVES ACO), Charles de Cortanze (troisième en partant de la droite) avec à sa droite le secrétaire général de l'ACO Raymond Acat pendant les travaux (au centre, D.R. / ARCHIVES ACO), la présentation du circuit pendant la semaine des 24 Heures du Mans 1966 (ci-dessous, Ph. DREUX / ACO).