Soixante ans du circuit Bugatti –24 Heures Motos, le grand rendez-vous d’avril
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Soixante ans du circuit Bugatti –24 Heures Motos, le grand rendez-vous d’avril

Construit en 1965 et inauguré l’année suivante, le circuit Bugatti accueille du 17 au 20 avril les 24 Heures Motos, nées en 1978, et manche d’ouverture du Championnat du monde d’Endurance FIM EWC. Souvenirs de deux triples vainqueurs, Jean-Claude Chemarin et Vincent Philippe, et de Gérard Jolivet, détenteur du record de participations.

En guise d’introduction, revenons d'abord sur la genèse des trois grandes étapes de la moto sur le circuit Bugatti : Grand Prix de France (depuis 1969 par intermittence), Bol d’Or (de 1971 à 1977) et 24 Heures Motos (depuis 1978), qui ont grandement contribué à la réputation du circuit Bugatti. « Il est très probable que l’organisation du Bol d’Or sur le circuit Bugatti a conforté sa vocation de circuit international, analyse Jean-Marc Desnues, ancien directeur de la communication de l’ACO et actuel vice-président de la Fédération internationale motocycliste (FIM) – Europe. Il faut se souvenir que, à l’époque, en France, c’était l’endurance qui attirait le plus de spectateurs, avec la réputation du Bol d’Or créé en 1922, comparable à celle des 24 Heures du Mans en automobile. L’autre élément qui a conforté l’image du Bugatti, c’est naturellement le Grand Prix de France. Depuis 1978, le succès des 24 Heures Motos, dont la 48e Edition se déroule en 2025, contribue également à cette notoriété. »

"En termes de notoriété, Le Mans reste Le Mans, et ça ravit les pilotes."
Jean-Claude Chemarin, vainqueur des 24 Heures Motos 1978, 1979 et 1981

Les premières 24 Heures Motos se disputent les 28 et 29 avril 1978. « L’ACO a eu une très bonne idée en organisant sa propre épreuve de 24 Heures, indique Jean-Claude Chemarin, qui en a ouvert le palmarès en compagnie de Christian Léon. En termes de notoriété, Le Mans reste Le Mans et ça ravit les pilotes. Il y a aussi le départ type Le Mans, spectaculaire, stressant pour les pilotes mais aussi pour le public : toujours un grand moment. »

Prématurément disparu en 1980, Christian Léon inaugura en 1978 le palmarès des 24 Heures Motos en compagnie de Jean-Claude Chemarin.
Prématurément disparu en 1980, Christian Léon inaugura en 1978 le palmarès des 24 Heures Motos en compagnie de Jean-Claude Chemarin.

Equipage de référence de l’endurance moto tricolore de la fin des années 1970, Christian Léon et Jean-Claude Chemarin s’imposent à nouveau en 1979. « Nous avons formé un duo soudé pendant plusieurs années, sur Honda, poursuit Chemarin. Pour le départ, Christian était un excellent sprinter. Une fois en piste, il était très vite dans la performance. Quant à moi, je roulais beaucoup la nuit. Chacun avait ses responsabilités. » Jean-Claude Chemarin signe une troisième victoire en 1981, cette fois en compagnie de Christian Huguet.

"Les 24 Heures Motos sont très dures à gagner et c’est pour ça qu’on les aime. La difficulté décuple le plaisir de la victoire."
Vincent Philippe, vainqueur en 2003, 2014 et 2015

Né trois mois et demi avant la première édition des 24 Heures Motos, Vincent Philippe y a signé trois victoires : « J’ai eu la chance de gagner les 24 Heures Motos dès ma première participation en 2003. Tout s’était bien déroulé, comme rarement en endurance. Tout était parfait, ce qui n’arrive pas souvent ! En 2014 et 2015 nous n’étions pas les plus performants, nous n’étions pas favoris sur le papier, les conditions étaient difficiles. Au sein du SERT (Suzuki Endurance Racing Team, aujourd’hui rebaptisé Yoshimura SERT Motul, NDLR), nous étions parfaitement préparés et l’expérience a payé ». Les onze ans d’attente entre ses deux premières victoires lui ont permis de mesurer la difficulté de remporter à nouveau les 24 Heures Motos : « elles sont très dures à gagner, donc ça décuple le plaisir et c’est pour ça qu’on les aime », résume-t-il en souriant.

Vincent Philippe (à gauche) lors de sa deuxième victoire aux 24 Heures Motos en 2014, en compagnie (de gauche à droite) de Dominique Méliand, à l'époque patron du Suzuki Endurance Racing Team (SERT), et de ses coéquipiers Erwan Nigon et Anthony Delhalle.
Vincent Philippe (à gauche) lors de sa deuxième victoire aux 24 Heures Motos en 2014, en compagnie (de gauche à droite) de Dominique Méliand, à l'époque patron du Suzuki Endurance Racing Team (SERT), et de ses coéquipiers Erwan Nigon et Anthony Delhalle.

En 1982, le Manceau Gérard Jolivet inaugure un bail de 25 ans, riche de souvenirs en tout genre, avec les 24 Heures Motos : « Dans la courbe Dunlop (qui ne comportait pas de chicane à l’époque, NDLR), la moto se levait et retombait, il fallait pomper sur les freins pour rapprocher les plaquettes. Dans les stands, c’est l’ambiance du film Le Mans de Steve McQueen qui me vient à l’esprit. Il y avait une marche pour descendre avec la moto, et un couloir fermé gravillonné qui permettait d’accéder au stand. On pouvait faire des essais sur la moto dans le paddock ! Sauf que les racines des arbres y formaient des bosses sous le bitume. De plus, en tant que Manceau, il fallait absolument que je prenne le départ ; il s'agissait donc d'éviter la moindre erreur pendant les premiers tours de course. »

"Après ma 24e participation, Bruno Vandestick m’a suggéré d’atteindre le quart de siècle avec un 25e départ."
Gérard Jolivet, recordman des participations aux 24 Heures Motos

« J’ai terminé 5e en 1985 et 4e en 1989, avec la victoire en catégorie Superstock en 1999. En 1985, j’ai également disputé pour la première fois l’intégralité du Championnat du monde d’Endurance EWC, se souvient-il. Cette année-là, aux 24 Heures Motos, mon coéquipier Jean Basselin, qui était le régisseur de la collection de Johnny Hallyday, avait amené Coluche, mais j’étais en piste à ce moment-là ! » Après avoir battu le record de participations d’Hervé Moineau (19 départs et une victoire en 1980), Gérard Jolivet atteint en 2005 le nombre symbolique de 24 participations en 2005 : « Bruno Vandestick m’a alors suggéré de pousser jusqu'au quart de siècle avec un 25e départ ». Dont acte en 2006, avant un retour quelques années plus tard... au micro, pour devenir l’un des « coéquipiers » de la voix du circuit Bugatti et de celui des 24 Heures.

Gérard Jolivet (à droite) en compagnie de Bruno Vandestick.
Gérard Jolivet (à droite) en compagnie de Bruno Vandestick.

Alors que la 48e édition boucle ses premiers tours de piste, Jean-Claude Chemarin, Vincent Philippe et Gérard Jolivet restent des observateurs éclairés et passionnés des 24 Heures Motos. « Je suis un très bon spectateur et je suis très agréablement surpris par la technologie des motos », indique le premier. Pour la course, le deuxième évoque Suzuki, qui détient par ailleurs le record de victoires aux 24 Heures Motos avec seize succès, et plus précisément la n°1 de l’équipe Yoshimura SERT Motul, victorieuse en 2024. Ce que confirme le troisième : « ils se ratent rarement et font zéro erreurs ». Et Jean-Claude Chemarin de conclure : « Pour cette édition 2025, on prévoit des averses pour le week-end, alors il sera question de tactique, et ça permettra peut-être aussi de découvrir des pilotes qui seront très bons et se révèleront sous des conditions humides ».